vendredi, septembre 22, 2023
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    Portrait : Viviane Afi Assogba, un exemple à suivre en matière d’entrepreneuriat

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    En entrepreneuriat, ce ne sont pas des ‘âmes bien nées’ qui manquent au Togo. Ce qui manque, c’est la détection rapide de ces talents et leur accompagnement précoce. Viviane Afi Assogba est l’une de ces ‘âmes bien nées’. A 32 ans, cette mère de 2 enfants est la responsable de Genial Wok, une structure qui est dans la transformation des fruits et légumes en cocktail.

    Nantie d’une licence en communication marketing, des ‘j’ai l’honneur’ en poche et après plusieurs stages et contrats à durée déterminée dans plusieurs structures de la place, elle est revenue en 2016 à ses premiers amours, la cuisine et la pâtisserie. Aujourd’hui, sans financement extérieur, son entreprise produit 2.500 bouteilles de jus de fruits sans eau et sucre ajoutés et estampillés ‘Liora’, emploie 7 personnes à plein temps, un restaurant qui fait la promotion de la cuisine végétarienne et végétalienne.

    Mais ce chemin réussi en 3 ans, n’a pas été parcouru sans embûches, même si la dame se sent dans ce domaine comme un poisson dans l’eau. Le chemin est parsemé de hauts et de bas, d’échecs et de réussites et la bataille se poursuit avec à la commande, Viviane Assogba qui cherche à hisser son entreprise au firmament de celles qui ont le plus réussi.

    Un talent qui s’est révélé très vite

    Tout a commencé pour cette entrepreneure très tôt, lorsqu’elle était encore en 6ème. « Je suis issue d’une famille de 4 enfants avec 3 filles et un garçon. J’en suis la 2ème. Pendant mon cursus scolaire, mes parents ont remarqué que j’ai une passion pour la cuisine. J’aimais préparer, faire des mets. Déjà en 6ème, je collectionnais les photos de recettes. J’en faisais des photocopies des photos de recettes, et les astuces beauté qu’il y a dans les romans photos. Mon papa disait que je devais faire la cuisine après le BEPC. Ma maman rétorquait que sa fille doit faire ses études universitaires pour devenir un cadre un jour », se souvient-elle le sourire aux lèvres.

    En classe de Seconde A4, elle a suivi une formation en journalisme et en cuisine et pâtisserie. Et les actions ont suivi naturellement. « A partir de là, je dérangeais mes amis. Qui fête son anniversaire, je dois lui faire un gâteau. C’était de pouvoir mettre en pratique tout ce que j’ai appris », a-t-elle narré.

    Cette belle passion de jeune fille va prendre un coup de frein avec le baccalauréat. « Après le BAC, j’ai opté pour la communication. En ce moment, j’étais encline vers le journalisme et la communication. L’ISICA était ouvert 2 ans plus tôt, j’étais entrée par concours. J’y ai fait les 2 ans parce qu’il n’y avait pas encore de licence. Après ça, j’ai fait la licence à l’IAEC toujours en communication Markéting », se rappelle-t-elle.

    Après ces études, s’en est suivie une période de stage et de travail. Ces moments difficiles, toute comme la belle page entrepreneuriale qu’elle traverse aujourd’hui,  sont gravés dans sa mémoire. « J’ai fait un stage à Ecobank, à la CEB, j’ai travaillé à la CEET pendant 1 an sous des CDD de 3 mois renouvelables jusqu’à un an. On avait atteint nos objectifs mais finalement, le projet a été arrêté et je n’ai pas été retenue. Je suis revenue à la maison ».

    Le second déclic sera le bon

    Le nouveau déclic reviendra dans un cabinet entrepreneurial où elle a travaillé grâce à l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE) pendant un an, contrat à l’issue duquel elle est revenue restée à la maison. « Là, je suis entrée en contact avec le monde entrepreneurial où de différents projets notamment de cuisine, d’élevage sont financés. J’étais étonnée de voir que la passion que nourris depuis, les gens la mettaient à profit devant moi. C’est là que j’ai commencé par faire des yaourts que j’apportais au bureau », se rappelle-t-elle.

    Mais depuis, Viviane n’a plus lâché prise. Contre vents et marées, elle a tenu le coup et a su s’accrocher aux quelques supports qui lui étaient venus en ce moment. « Le contrat a duré un an, je suis revenue rester encore à la maison et j’ai continué avec le yaourt. Entre temps, dans mon quartier, les gens qui vendaient du jus ont arrêté et j’ai repris ce service. Très tôt, on a eu assez de clients. Il fallait faire des jus chaque jour. C’est suite à cela qu’une amie m’a demandé de mettre les produits en bouteille et de l’apporter à leur responsable pour voir ce qu’il en est. Le jus le plus prisé était le pain de singe, communément appelé baobab, ce qui m’a mise en contact avec l’Organisation pour l’alimentation et le développement local (OADEL) et je suis devenue entrepreneure dans le domaine agricole ».

    De 2 échantillons qui ont été apportés à OADEL, la jeune entrepreneure est passée à une commande de 100 bouteilles. Elle n’en revenait pas. Une semaine plus tard, une autre commande de 100 bouteilles. « On leur a demandé 2 jours et on est parti chercher la poudre du baobab, les ingrédients et les bouteilles. On a dû livrer sans étiquette parce qu’on n’était pas préparé », se souvient-elle.

    L’organisation ayant remarqué le travail bien fait, n’a pas tardé à apporter son aide à la jeune dame. « Elle nous a demandé de trouver un emplacement pour mettre en place une unité et ils vont nous aider à avoir la certification et maîtriser le processus de transformation. Suite à cela, j’ai fait une demande à ma mère qui avait des locaux qu’elle n’utilisait pas. Nous avons installé l’unité et OADEL nous a fait un accompagnement sur une année, de janvier 2016 à janvier 2017 », une aide cde taille, salue-t-elle.

    Des appuis qui balisent la voie

    Après ces 12 mois d’accompagnement sous les auspices d’OADEL et après analyse des produits par l’Institut togolais de recherche agronomique (ITRA), la certification est dans la poche. Viviane est donc entrée de pleins pieds dans le monde entrepreneurial. En tout cas, le Rubicon est désormais franchi. Suite à cela, le lancement de la marque ‘Liora’ a été fait.

    A cette époque, révèle-t-elle, « on avait 4 saveurs. Lors du lancement, on a fait développer d’autres produits et on avait au total 10 saveurs. C’est ainsi qu’on a changé le nom unique de chaque produit en une marque qui est Liora qui signifie lumière ».

    La marque a été lancée le 8 décembre 2017 à Innov’up, le centre entrepreneurial des femmes d’affaires du Togo. « Suite à ça, on a connu une explosion de commandes. On est passé de 100 à 500 bouteilles et à 2500 bouteilles par mois. C’était vraiment une évolution fulgurante qui nous a permis aujourd’hui d’avoir notre boutique, de pouvoir gagner en part de marché, d’atteindre tous les boutiques-produits qu’on a sur place et d’être également dans les étalages de Ramco. Entre-temps, on a eu des codes-barres qui permettent qu’on puisse entrer dans les supermarchés », révèle l’entrepreneure.

    Le 14 décembre 2018, une autre importante étape a été franchie : l’inauguration de la boutique d’Adidogomé. Avec Innov’up, l’accompagnement a été dans la gestion financière, la gestion de stocks, des ressources humaines. « Ce qui nous a permis d’avoir au moins 7 employés et on a maintenant un restaurant qui fait livrer les petits déjeuners et déjeuners aux clients dans les bureaux et services », reconnaît-elle.

    Imposer sa passion ou rien

    Même si aujourd’hui la mère de Viviane Assogba est l’un de ses premiers soutiens, les choses n’ont pas été, au début, faciles entre les deux femmes. Maman imaginait que sa fille fera des études universitaires et deviendra, comme elle, un cadre dans l’administration.

    Si cette idée ne déplaisait pas à Viviane, elle avait néanmoins une idée exacte de ce qu’elle voulait faire de sa vie. « On ne livrait qu’à OADEL. Il fallait attacher les jus, aller en face de la Chambre de commerce et d’industrie pour commercialiser. Et c’était non loin de la direction de la CEET, ma maman n’était pas du tout d’accord. Cela n’a pas été facile. Mais j’étais engagée parce que je me suis dit que si quelqu’un a pu croire en ça, et a décidé de nous accompagner, c’est que cela peut donner quelque chose. Et puis, j’étais très à l’aise dans ce que je faisais », dit-elle, sereine.

    Le conflit entre mère et fille s’est poursuivi et la retraite de la mère a compliqué la situation. Les 2 femmes étaient à la maison et se voyaient régulièrement. Elle n’oubliera jamais ces moments. « Elle me voit puiser de l’eau, aller et revenir. Elle m’a dit de lui envoyer mon CV. Des fois, je le fais, des fois, je refuse et c’était tendu entre nous ».

    Les changements ont commencé avec une invitation que Viviane Assogba a reçue du Burkina Faso et au Forum du paysan à Kara (452 km au nord du Togo), aux fins de venir présenter ses produits. « Ma mère m’a remis une somme de 30.000 francs pour faire le voyage. Elle a commencé par comprendre que c’est du sérieux et que si on s’y met, cela devrait donner quelque chose », dit-elle, le visage illuminé.

    A partir de ce moment, les bonnes nouvelles se sont suivies pour l’entrepreneure. C’est sa mère qui l’a accompagnée à faire des achats d’équipements qu’il faut. « On a acheté un extracteur qui nous permet aujourd’hui de faire 150 litres par heure. On a aussi acheté un pasteuriseur qui nous permet de faire une production de 500 bouteilles par jour, ce qui a lancé plus l’activité. Lors de l’inauguration de la boutique, ceux qui étaient là ont remarqué qu’elle était vraiment fière de moi. Aujourd’hui, elle m’encourage à toujours exceller dans  ce que je fais», s’est-elle réjouie.

    Sa mère est devenue une force pour elle, ce qui lui permet de vaquer librement à ses activités. Et pour cause, ses 2 enfants sont en semaine chez sa mère. Elle reconnaît que c’est une force incommensurable. « Les week-ends, j’essaie de passer le plus de temps possible avec eux, ce qui fait que pour le moment, j’arrive à m’en sortir. J’ai d’autres collègues entrepreneures qui n’ont pas les mêmes chances et qui souffrent en changeant les personnels de maisons à longueur de semaines ». 

    La 2ème force de cette entrepreneure, c’est son mari. « Je me suis mariée en décembre 2010. C’était même avant de travailler à la CEET. J’ai un mari qui m’assiste dans mon travail et il est également le conseiller en nutrition de l’entreprise. C’est grâce à lui qu’on a les saveurs qu’on a actuellement. C’est grâce à lui que j’ai pu croire à la passion que j’ai. Je le dis aujourd’hui si facilement mais ce parcours n’a pas été du tout facile. Il y a eu des soucis financiers, des périodes de mévente. Des fois, on est découragé et on a envie de laisser tomber. Mais il est toujours là pour souffler le dernier mot, avoir foi en ce qu’on fait », a-t-elle déclaré avec insistance.

    Profiter de l’expérience acquise

    Viviane Afi Kékéli Assogba est aujourd’hui mère de 2 enfants, un garçon de 5 ans et une fille de 7 ans. Avec cette dernière, elle ne pense pas commettre les mêmes erreurs. « Vu l’expérience que j’ai eue, je me suis dit que si j’ai été encouragée depuis à faire cette activité, je ne serai pas à ce niveau. Si j’avais été encouragée depuis l’époque où je me suis engagée, je serais loin », a-t-elle lancé.

    Elle dit avoir appris de toute ce qui précède qu’il ne doit plus y avoir de génération qui va d’abord finir les études, être désœuvrée avant de s’accrocher à ce qu’elle veut faire.

    « Si ma fille me dit demain qu’elle n’est pas intéressée par mon activité, je ne pense pas l’y obliger. A cet effet, nous essayons de transmettre la passion qu’on a à nos employés de façon à faire pérenniser nos entreprises. En Europe, ce n’est pas seulement les enfants qui l’ont fait mais il y avait des employés qui partageaient la même vision », rassure-t-elle.

    En guise d’anecdote, elle raconte ceci : « on était à l’hôpital et ma fille avait peur des piqûres. Je lui ai demandé si elle va accepter d’être médecin quand elle sera grande. En réponse, elle a dit qu’elle sera couturière. Elle ne me l’a jamais dit (sourire) ».

    D’un air sérieux, elle dit : « C’est l’avenir qui nous le dira. Aujourd’hui, il y a des femmes dans le domaine du textile qui font de la merveille. La couture ne s’arrête pas qu’à faire des habits. Si on arrive à découvrir la passion de nos enfants, on fera autrement que nos parents ».

    Pour Thierry Tsogbalé, le mari, il n’y a pas plus téméraire et courageuse que Viviane. « Elle est un modèle. Son seul défaut, c’est qu’elle est très oublieuse », dira-t-il avant d’ajouter, toute entrepreneure comme ma femme, a besoin de plus de soutien de sa famille pour aller loin.  

    L’envie de gravir les échelons

    Genial Wok fonctionne sur fonds propres. Mais la porteuse de cette entreprise nourrit des ambitions élevées. « On veut aller à 10.000 bouteilles en 2019 », envisage la porteuse. L’atteinte de ces objectifs, selon Viviane Assogba, passe par des financements.

    « Notre activité s’est basée essentiellement sur nos propres fonds, nous n’avons pas eu de financement. Mais on fait toujours ce qui est bon avec les moyens qu’on a. Nous réservons des surprises parce que très bientôt, nous allons évoluer en termes de capacité de production, d’employés. Les difficultés concernent la disponibilité des fruits qu’on ne trouve pas en fonction des saisons, des producteurs qui ne sont pas toujours fidèles », prévient-elle. 

    Genial Wok ne veut plus évoluer en fonction des saisons et ne produire les jus en abondance que lorsque les fruits sont disponibles. Par exemple actuellement, il n’y pas de melon, donc pas de jus de melon.  « Dans nos perspectives, on compte faire des vergers qui vont nous permettre de ne plus être à la merci de la saison et de faire valoir valablement tous les fruits. Nous avons des champs de légumes gérés par des groupements de femmes. On donne des lopins de terrain à chacune et on les mobilise pour nous faire des produits dont on a besoin en fonction des saisons. Pour le melon par exemple, on demande à ces femmes de le produire à contre-saison de façon à ce qu’on puisse retrouver les fruits à temps voulu », telles sont les ambitions.

    Mesdames les jeunes filles, réveillez-vous !

    La tenante de Genial Wok dit avoir l’impression que la génération actuelle est dans l’optique où l’école suffit. « On ne sait jamais ce que l’avenir nous réserve. Lorsqu’on a une passion, il faut la développer pour ne pas dire après ‘si je savais’. On attend toujours tout de nos parents, du gouvernement. Il faut se battre pour ce qu’on veut, s’investir et ne pas attendre d’autrui. Il faut aller vers l’information. On a l’habitude de rester dans notre univers et on n’est pas informé des opportunités et accompagnements qu’on peut avoir. Nous avons aussi l’internet », a-t-elle lancé à l’endroit de ses jeunes sœurs.

    Pour sa part, elle regrette d’avoir perdu si tôt son demi-frère aîné, Koffigan Thomas Assogba, un homme qu’elle considère comme son modèle. « Lorsque j’étais têtue, c’est lui qui venait me raisonner. Mais en ce moment, je ne savais pas à quel point il était versé dans l’entrepreneuriat. C’est lors de son décès qu’on a cité tout ce qu’il a fait, je me suis dit qu’il était le mieux placé pour me diriger dans l’option entrepreneuriale. Je me suis demandé pourquoi il m’a quittée aussi tôt », a-t-elle déclaré entre deux larmes.   

    La jeune dame de Kouvé raffole de salade et de soupe de manioc. Et s’il lui était donné de prendre un congé tous frais payés, elle se rendrait à Kpalimé ou dans le plateau de Danyi sur le plan local. « La nature y est calme, les montagnes sont géniales ». Et s’il lui était donné d’aller à l’extérieur, ce serait en Haïti. « Ils ont presque les mêmes fruits et ingrédients que nous, la nature est plus ou moins ensoleillée qu’en Afrique ».

    Ce portait a été réalisé dans le cadre de la 2ème édition du projet Global Com Leadership féminin, porté par le site d’informations Global Actu, en partenariat avec le Mouvement pour une Afrique meilleure (MAM).

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